Allez-y tirez, Soro n’est pas encore mort

Article : Allez-y tirez, Soro n’est pas encore mort
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29 juin 2016

Allez-y tirez, Soro n’est pas encore mort

Guillaume Soro s’est fait attaquer par la justice burkinabé et française. Le peuple s’est réjoui. Enfin! Un sentiment de satisfaction, une nouvelle rafraîchissante dans cette chaleur accablante d’Abidjan. Inutile de démarrer l’air climatisé. Devant Facebook, loin du tribunal, loin des pénitenciers, loin des asiles psychiatriques, les lyncheurs de l’opinion publique sont de nouveau prêts à jacasser après cette interview accordée à RFI. Encore. Plusieurs milliers de partages et de commentaires sur cette nouvelle.

Dans ces six derniers mois, il y a eu davantage de vues, de commentaires et de publications sur Guillaume Soro que sur les changements climatiques et la salubrité d’Abidjan et même le concept le l’ivoirien nouveau. Ce n’est pas rien. Les médias savent vendre des journaux. Il faut écraser la corde sensible comme de la menthe pour servir des mojitos bien juteux, c’est plus appétissant que le lave-vitre. Changer le monde, à quoi bon? La vie d’un seul homme sur 23 millions mérite beaucoup plus d’attention.

« Mandat d’arrêt contre Guillaume Soro, la justice burkinabè persiste et signe » Jeune Afrique : 1.24K de partage.

Allez-y, tirez, il saigne encore. Dépêchez-vous avant que quelqu’un le remplace.

C’est facile de frapper sur un homme anéanti, ça donne l’impression d’être une bonne personne. Quel courage, j’aimerais être un semi-dieu, immunisé devant la dérive. J’aimerais tellement penser que ça ne pourrait pas m’arriver à moi ou un membre de ma famille. J’aimerais être immunisé à la folie, aux drames et à la démence. Le sang sur les dents, plus, toujours plus. Mordillez en meute, jusqu’à la moelle, notre société n’a jamais été aussi malade, justement. Il faut répondre à la barbarie, par la barbarie. Il faut répondre à la violence, par la violence.

Jugez le meurtrier, c’est votre droit. Votre opinion vous appartient. Mais, n’oubliez jamais que juger le meurtrier, c’est escamoter la plus grande des violences, plutôt que de comprendre. C’est brûler les pages du roman avec cette certitude dérisoire de l’ignorant qui croit tout savoir. Celle qui envenime les drames, au lieu de tendre la main. C’est une réponse incompréhensible, c’est la peur d’avouer que le pire assassin nous ressemble. Soro Guillaume est un homme anéanti, détruit, un homme mort. À chaque nouvelle, la basse-cour se remet à jacasser. Vous êtes tellement courageux. J’aimerais être comme vous. Il n’y a pas d’âge pour comprendre que la raison peut basculer du jour au lendemain. Il n’y a pas d’âge pour se rendre compte que, dans chaque être humain, il y a du mal. Il n’y a pas d’âge pour comprendre que derrière les apparences trompeuses se cachent de grands drames.

Est-ce satisfaisant ? Soro n’est pas encore mort. Il saigne seulement. Il se réveille probablement chaque matin, la tête dans son cul, lorsqu’il n’est pas matraqué par les médias. Pour ne plus rien sentir du tout.

Allez-y, réjouissez-vous, il n’est pas encore mort. Il faut faire vite. Bientôt, il y aura un prochain bouc émissaire à lapider, pour satisfaire vos besoins les plus nauséabonds.

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Commentaires

Benjamin Yobouet
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Mdr !

Mathyas KOUADIO
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Faut pas rire mon cher Benjamin les lyncheurs de l'opinion publique sont près a jacasser. A qui le tour? on ne sait vraiment pas.